A la suite des mages, nous sommes invités à aller à la rencontre de Jésus. Le thème des J.M.J. commence par « Venez » - les mages se sont mis en route. Ils ont cherché et se sont renseignés. Ils ont dû se dire que le chemin était bien long et parfois compliqué. Mais ils n'ont pas perdu confiance dans l'étoile. Dans l'Evangile, c'est étonnant comment Jésus marche avec ses disciples et même à propos de l'Eucharistie, il les invite à passer sur l'autre rive du lac, celle de la foi (Jn 6,17). A la fin de ce chapitre, Jean ajoute que nombre de ses disciples se retirèrent et cessèrent de l'accompagner. Peut être que le chemin de foi dans l'Eucharistie devenait trop difficile ? Pensez aussi au long chemin qu'ont fait les disciples d'Emmaüs avant de reconnaître Jésus Ressuscité, présent dans son Eucharistie.
Tout au long de ces J.M.J., vous les jeunes, vous êtes invités à faire ce chemin de foi comme les mages, comme les disciples d'Emmaüs et à passer sur l'autre rive, celle de la Foi où nous disons : « Nous croyons Seigneur que tu es présent dans ton Eucharistie ». Vous savez sans doute que le Pape Jean-Paul II avait consacré cette année à l'Eucharistie, à la Messe tout simplement. Ce mot Eucharistie remplacé souvent par le terme « Messe » vient d'un mot grec qui veut dire « rendre grâces ».
Nous pouvons aller à l'Eucharistie pour diverses raisons. Peut-être parce que nous animons les chants, parce que nous allons y rencontrer des amis parce que nous aimons bien le prêtre qui célèbre ou tout simplement parce que nous venons pour prendre un temps de prière ? Mais avons-nous vraiment le désir de rencontrer le Christ ? Y allons-nous pour Jésus ? Vivre l'Eucharistie, c'est chercher à rencontrer le Christ vivant. Choisir l'Eucharistie, c'est choisir la vie.
Si nous revenons aux mages, ils ont découvert Jésus dans une mangeoire d'animaux. Il y a donc bien des chemins différents pour le trouver mais pour nous, le mode privilégié pour le rencontrer est celui de l'Eucharistie. C'est en méditant le chemin parcouru par les mages que nous comprendrons mieux la manière dont ils l'ont trouvé. Vous connaissez sans doute l'émission télévisée « la carte au trésor ». Le texte d'Evangile sur les mages ressemble aux indices de la carte au trésor. Osons partir à l'aventure en suivant ces personnages.
1) « Quand ils virent l'étoile, ils éprouvèrent une très grande joie » nous dit le texte de Matthieu.
L'étoile vous fait sans doute penser à la voûte céleste. Les mages étaient des scrutateurs d'étoiles. Ils observaient le ciel. Ils nous font penser au monde scientifique. Mais nous savons que ceux qui scrutent les astres veulent aussi y lire le destin des personnes. Il suffit d'évoquer la place que tient l'horoscope dans la vie de certaines personnes. Les mages sont étrangers à la foi Juive. Ils adorent sans doute des divinités. En même temps, ils sont riches et puissants. Ils exercent un certain pouvoir dans leur société. Il est beau d'imaginer que c'est le monde scientifique, politique, économique, médiatique et même certains courants marqués par l'ésotérisme et la magie qui se mettent en quête d'une étoile. Tout ce monde, en voyant l'étoile, éprouve une très grande joie.
Nous savons qu'en anglais « étoile » se traduit par « star ». Nous pensons aux stars du show-biz, aux stars du sport. On a même créé, il y a quelques années, un Jésus super-star. Ici, dans l'évangile, la star est tout autre, c'est un petit enfant dans une mangeoire d'animaux. Mais avant d'entrer dans Bethléem, les mages sont passés par Jérusalem. Ils se sont laissés guider par l'étoile jusqu'à cette ville mais l'étoile s'est effacée pour laisser place à la Parole de Dieu, aux prophètes de l'Ancien Testament. L'étoile a pu les guider mais elle n'a pas suffi. De même, lorsqu'ils seront arrivés à Bethléem, l'étoile va disparaître pour laisser place à l'enfant Jésus.
Et pour vous, posez-vous la question : Est-ce que vous vous laissez guider par une étoile ? Qu'est-ce qu'elle représente pour vous, jeunes ? Est-ce un idéal, un rêve, un projet, une personne ? Dans la bible, l'étoile apparaît comme la lumière au c½ur de la nuit et quand les mages l'ont trouvée, ils ont éprouvé une grande joie. L'étoile est restée fidèle, elle ne les a pas trompés. A la différence du star-système qui n'est souvent composé que d'étoiles filantes, il y a d'authentiques étoiles dans notre monde. Quelles sont les étoiles que vous aimeriez suivre ?
En même temps, l'étoile ne suffit pas. Sans la Parole de Dieu, les mages n'auraient pas trouvé l'enfant. Quelle est la place de la Parole de Dieu dans votre vie ? Est-ce qu'il vous arrive de lire un passage d'Evangile, de murmurer dans votre c½ur une phrase que vous aimez bien ?
Lorsque nous allons à l'Eucharistie, il y a tout un temps qui est consacré à écouter la Parole de Dieu et même l'homélie doit nous aider à la comprendre, à la méditer ? Est-ce qu'il vous arrive de lire les textes de la messe avant d'y participer ? Est-ce que vous avez déjà vécu l'expérience de temps de partage de la Parole de Dieu ? Vous pressentez que cette Parole nous aide à ouvrir nos c½urs pour rencontrer le Christ comme l'ont vécu les mages et les disciples d'Emmaüs. Est-ce que nous demandons à l'Esprit-Saint de nous éclairer pour que la Parole de Dieu nourrisse notre vie ?
2) « En entrant dans la maison, ils virent l'enfant avec Marie, sa mère » ajoute l'Evangile.
L'étoile a conduit les mages à Bethléem. Ce mot signifie « la maison du pain ». C'est déjà tout un symbole. Et au c½ur de Bethléem, il y a là un petit enfant non pas dans une auberge mais dans un abri à l'écart. Vous avez peut être remarqué que le verbe voir est répété. D'abord les mages voient l'étoile, puis ils voient l'enfant. On a l'impression que l'étoile et l'enfant ne font qu'un. Auprès de cet enfant se trouve Marie, sa mère. Luc nous dit que les bergers sont venus pour voir le nouveau-né, il était couché dans une mangeoire, car il n'y avait pas de place pour lui et sa famille dans la salle commune.
J'ignore comment vous auriez réagi si vous aviez été à la place des mages, mais ils ont dû être surpris. Tout au long de leur parcours, ils avaient vu des choses grandioses. A Jérusalem, ils avaient vu le palais d'Hérode, ils avaient rencontré des personnages importants, des savants, des grands prêtres. Dieu avant même son temple qui lui était consacré. Il avait fallu 46 ans pour le bâtir et c'était l'une des merveilles du pays. Or, voilà que l'étoile les a conduit vers une maison à l'écart, un abri pour les animaux? J'admire la confiance et la foi des mages au-delà de leur surprise. Ils se sont laissés guider par un bébé de quelques jours.
Cet enfant nous révèle la présence de Dieu. Un petit bébé touche le c½ur des puissants comme celui des petits. Dieu s'est fait petit afin que les plus puissants de la terre comme les plus démunis n'aient pas peur de Lui et puissent même le prendre dans leurs mains. Un bébé, ce n'est pas une puissance qui écrase. Il est si fragile. Et voilà que cet enfant va rassembler autour de lui une humanité nouvelle, des mages et des bergers, des païens et des juifs. Les uns n'aurons qu'un peu de lait à lui offrir, les autres lui présenteront de l'or. Peu importe, pour prendre ce petit enfant dans ses bras, il faut avoir les mains vides, il faut accepter de se désencombrer de tant de choses. Il faut aussi apprendre à ouvrir ses mains pour l'accueillir car nous sommes nés les poings fermés et il faut toute notre vie pour apprendre à les ouvrir.
Dieu présent dans un petit enfant : qu'en pensez-vous ? N'est-ce pas surprenant ? Il est grand le mystère de la Foi. Nous le disons aussi à propos de l'Eucharistie. Le Christ présent dans un morceau de pain, dites : N'est-ce pas mystérieux ? Il faut le regard de la foi pour voir dans cette hostie la présence de Jésus, mort et ressuscité. Vous pressentez que c'est la même présence discrète à Bethléem et dans l'hostie. Dans le texte de Matthieu, il est dit que les mages virent l'enfant avec Marie sa mère. Elle est là, discrète, silencieuse, une authentique femme de foi comme elle le sera à Cana et au Golgotha. Elle nous est donnée par Dieu comme la première sur le chemin de la foi. Priez-la afin qu'elle vous aide à grandir dans la foi.
Mais quel lien allez-vous dire entre ce petit enfant et le pain de l'hostie ? Ce n'est plus Jésus en chair et en os. D'accord. Mais croyez-vous que cela était plus facile pour les mages de découvrir la présence de Dieu dans ce bébé couché dans une mangeoire ? Pour manifester sa présence au c½ur du monde, Dieu est devenu petit enfant. Pour réaliser sa présence au c½ur de l'Eglise, Jésus a pris du pain et du vin et c'est à ce signe que nous le reconnaissons comme le Christ Ressuscité. Au lieu du pain, il aurait pu prendre un beau gâteau d'anniversaire. Il aurait pu choisir des tartelettes aux fraises ! Avouez qu'il y aurait eu plus de monde dans nos églises, le dimanche matin ! Non, il a pris du pain et il a dit : « Ceci est mon Corps livré pour vous ». C'est le signe qu'il a pris pour nous donner sa vie et nous montrer son Amour. Les premiers chrétiens quand ils célébraient l'Eucharistie, ils parlaient de la fraction du Pain.
Le pain, c'est ce qu'il y a de plus quotidien, de plus banal, dirions-nous et pourtant c'est la nourriture fondamentale. C'est pace qu'un grain de blé s'est offert, est devenu farine et que des hommes l'ont travaillé qu'il est devenu nourriture. Cela nous fait penser à la vie de Jésus : Il s'est offert, Il a été broyé par la violence, et Il est passé par la mort comme le grain de blé pour devenir nourriture divine. Le pain, c'est aussi la dignité retrouvée puisque l'on parle de gagner son pain à la sueur de son front. Ne dit-on pas aussi : « Bon comme du pain ». Dans le Notre Père, nous disons à Dieu : « Donne-nous aujourd'hui notre pain de ce jour ».
Le pain que le Christ nous donne, c'est un pain de vie. C'est à la fois le pain des hommes et le pain de Dieu. Mais Jésus a voulu donner ce pain de vie au cours d'un repas qui rappelle la libération des Hébreux. Recevoir le pain de Dieu, c'est quitter une terre d'esclavage pour atteindre une terre de véritable liberté. Le véritable repas est bien plus que la nourriture qu'on y partage. Pensez à la mamie qui organise le repas de famille une fois l'an. Elle rassemble toute la famille. C'est une manière pour elle de signifier son amour. Elle offre ses dernières forces pour nourrir et rassembler sa famille. Elle se fait « serviteur de communion ». Ce repas ne ressemble en rien à nos selfs-service, ni à certains lunchs où chacun va se servir. L'Eucharistie est communion à l'Amour même du Christ. Elle est le sacrement de l'Amour avec un grand A. En parlant de ce sacrement, le Pape Jean-Paul II a évoqué « le mystère de l'Amitié à laquelle le Christ Seigneur nous a invités ». Quand le Christ nous offre son Amour, cela devrait se voir. Mais, il répond toujours à la mesure de notre capacité d'accueil, à la mesure de notre foi.
Quelle place, accordez-vous à l'Eucharistie dans votre vie et surtout quel sens a-t-elle pour vous ? Beaucoup de jeunes disent avoir du mal à se retrouver à la messe. Ils se sentent parfois plus à l'aise dans un temps de prière. Quelles sont les raisons qui vous font dire cela ?
3) « Tombant à genoux, ils se prosternèrent devant l'enfant » écrit Matthieu.
Nous venons de faire le rapprochement entre l'enfant et le pain de l'Eucharistie. L'enfant est bien lui aussi le fruit de l'amour humain. Il en est de même le sommet. Le repas de la mamie pour sa famille est aussi le fruit de son amour. Il n'y a d'amour véritable que dans le don d'une vie. C'est ce que Jésus a fait pour nous. « Il aima jusqu'au bout » dit St Jean. Nous comprenons pourquoi les mages tombent à genoux et s'inclinent devant cet enfant.
« Ils lui offrirent de l'or, de l'encens et de la myrrhe » ajoute Matthieu. Ces trois symboles nous font penser à la royauté de Jésus, à son sacerdoce et à son ensevelissement. Mais, pour nous, ils ont une autre dimension. Qu'apportons-nous de notre vie à Jésus ? Et si c'était l'or de notre existence, ce qu'il y a de meilleur en nous. Nous pouvons dire comme St Ignace : « Seigneur, je t'offre ce que je suis, ma liberté, ma mémoire, mon intelligence ». Et si c'était l'encens de notre prière, notre merci à Dieu, notre louange. Et si c'était la myrrhe de notre affection, de notre amour, de notre gratitude. Vous percevez comment l'offrande des mages rejoint nos processions d'offrande au cours de l'Eucharistie. Nous ne venons pas à l'Eucharistie uniquement pour nous-mêmes. Nous sommes les délégués de l'humanité pour y offrir la vie des hommes. Si le pain n'est pas offert, il ne peut devenir le corps du Christ ! Si la vie des hommes n'est pas offerte à l'Eucharistie, elle ne peut être divinisée par l'Esprit-Saint. Pensez toujours que vous, jeunes chrétiens, vous êtes là au nom de tous ceux qui ne connaissent pas le Christ. Mais votre mission est d'offrir la vie des jeunes de ce temps afin que Dieu la divinise de sa Présence d'Amour. Posez-vous la question : Vous arrive-t-il d'offrir ce que vous êtes, ce que vous faites au cours de l'Eucharistie et même d'y apporter la vie du monde ?
Enfin les mages se prosternèrent dans un geste d'adoration. L'Eglise a développé au long des siècles cette belle tradition de l'adoration du Saint-Sacrement. En cette année de l'Eucharistie, le Pape Jean-Paul II a même rappelé que l'exposition du Saint-Sacrement devait constituer un souci tout spécial des communautés paroissiales et religieuses.
L'être humain est fait pour adorer. Mais souvent, il adore des objets ou des stars qui ressemblent à des étoiles filantes. Il est fait pour adorer Dieu et Lui seul. Quand nous adorons des créatures, nous risquons d'être déçus. Or, en adorant le Christ présent dans son Eucharistie, nous devenons peu à peu ce que nous contemplons. Nous le contemplons, nous laissons poser sur nous son regard. C'est un regard de confiance qui nous naître à la vie, un regard d'amour qui nous espère. Nous ne ressentons peut être aucune émotion mais peu à peu une paix envahit notre c½ur. C'est comme l'eau trouble qui se dépose au fond du ruisseau et qui devient transparente. Se laisser regarder par le Christ, c'est accepter de se laisser aimer. Nous naissons à la vie à la mesure des regards que l'on a posés sur nous. Si ce sont des regards de confiance, nous grandissons dans l'amour. Voilà ce produit en nous l'adoration Eucharistique.
Mais en même temps, nous nous offrons au Père avec Jésus, nous lui offrons notre vie, nous le supplions au nom du monde. Nous prions avec l'Eglise toute entière, avec cette communauté chrétienne qui a célébré Eucharistie. Nous rendons grâce au Père avec Jésus. C'est en ce sens aussi que toute notre vie doit devenir une louange au Père. Il s'agit toujours de passer de l'Eucharistie à une vie eucharistique, comme il nous faut passer de l'exposition du Saint-Sacrement à une vie exposée. St Augustin disait : « Si ta langue loue Dieu à certaines heures, c'est toute ta vie qui doit le louer ».
Vous les jeunes, je souhaite que ces J.M.J. vous permettent d'emprunter le chemin que les mages ont suivi et que ce pèlerinage soit l'occasion d'aller à la rencontre du Christ dans l'Eucharistie. N'oubliez pas que vous êtes aussi les sentinelles de l'Invisible comme l'a souvent évoqué le Pape Jean-Paul II.
Que l'Esprit-Saint vous éclaire et que le Seigneur vous bénisse. Ayez confiance en Lui. Il a une préférence certaine pour les jeunes que vous êtes.
+ Jean-Claude BOULANGER
Evêque de Sées
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